Les effectifs de l’armée romaine du bas-empire (IVème et Vème siècle)

Le nombre d’hommes d’une légion romaine a beaucoup varié avec le temps, passant de 5500 à 1200 légionnaires en quelques siècles. La question des effectifs de l’armée romaine des quatrième et cinquième siècle fait d’ailleurs l’objet d’une vaste littérature, jusqu’à une thèse qui fait aujourd’hui référence, celle de Terence Coello ( thèse de Terence Coello, unit sizes in the late roman army ).

A cette époque, le modèle « historique » de la légion n’existe plus : les réformes de Dioclétien, des tétrarques puis de Constantin ont fait exploser le cadre initial : fini les légions de 5500 hommes avec 300 cavaliers, renforcés généralement par un nombre presque toujours équivalent d’auxiliaires d’unités composées d’étrangers (barbares, pérégrins, c’est à dire habitants de l’empire sans avoir la nationalité romaine).

Désormais, le nombre d’unités romaines a connu une énorme inflation. Beaucoup plus d’unités, mais de taille bien inférieure, et beaucoup plus spécialisées qu’auparavant.Ces unités ne sont d’ailleurs pas que des légions, qui persistent évidemment.

On peut se résumer ainsi le nombre de soldats par légion romaine :

légions palatines : 1000-1500 hommes au maximum

Auxiliats palatins : 500 hommes au maximum

Légions comitatenses : 1000 hommes au maximum

Legions pseudocomitatenses : 1000 hommes au maximum

cohortes limitanei ou ripenses : très variable, d’autant plus que le phénomène de dispersion des unités dans des postes de garde très réduits (burgi accueillant parfois moins de 20 milites !) a fini par désintégrer les unités en tant que telles, d’où d’ailleurs la création juridique de nouvelles catégories inférieures de soldats, les castellani (ou castriciani) et les burgarii.

auxiliaires limitanei : même concept que pour les cohortes de légionnaires, avec sans doute un statut, un armement et des effectifs encore inférieurs.

Vexillations palatines ou comitatenses de cavalerie : Entre 500 et 300. Plus le prestige était grand, plus les unités avaient les moyens d’être nombreuses, mais ça n’est que conjecture. Nous savons toutefois que les scholes palatines, unités d’élite de cavalerie parmi l’élite, étaient fortes de 500 combattants.

Alae : les ailes de cavalerie des armées de frontière ne dépassaient pas les 500 cavaliers

Cunei : 50 cavaliers, guère plus.

Ces chiffres  doivent être précisés. Terence Coello considère qu’ils sont théoriques, et ne correspondent pas tout à fait à la réalité. Selon l’auteur, il faut plutôt considérer que le nombre de soldats disponibles représentait environ 70% de ces effectifs théoriques.

Pourquoi ? Parce qu’entre les maladies, les blessures, les désertions et tous les autres facteurs d’attritions bien connus des armées de toutes les époques, la capacité opérationnelle des unités était inférieure.

Par contre, phénomène souvent constaté, avant de longues campagnes, des recrutements massifs pouvaient aller jusqu’à faire excéder le nombre réel de soldats par rapport au nombre théorique.

composition légion romaine bas-empire (armati, scutati, sagittarii)
Une bonne vision de la composition des unités romaines du bas-empire. Armati devant, scutati derrière, sagittarii encore derrière et equites (cavalerie) sur les côtés

En ce qui concerne la composition des ces troupes, on estime qu’elles étaient composées au IVème siècle de trois catégories de soldtats :

  • Armati : soldats de première (et dernière !) ligne, il étaient mieux équipés en armement défensif, essentiellement une cotte de maille longue  appelée Lorica Hamata
  • Scutati : soldats de deuxième ligne, il partageaient avec les Armati le même casque (fabriqué en série par les fabricae, les usines d’armements du bas-empire romain), le même bouclier lourd ovale, mais étaient pour la plupart dépourvus d’armures.
  • Sagittarii : les unités romaines disposaient désormais toutes d’une composante légère regroupant des archers, voire plus rarement des frondeurs. Désormais, les auxiliats fait d’archers souvent « ethniques » (syriens, frondeurs Baléares…) n’existent plus, chaque unité à ses hommes de trait.

La photo d’illustration indique bien la manière dont étaient disposés les hommes, d’après l’état de nos connaissances.

Pour mon projet de comitatus gaulois, que j’ai choisi de placer en 399 (je reviendrais sur ce choix), nous disposons d’une source littéraire d’importance : le poète Claudien. Celui-ci a écrit un livre, de bello gildonico, sur la révolte du Comte d’Afrique Glidon face au pouvoir impérial en 397-398.

Grâce à un passage du livre, nous avons précisément la composition du corps expéditionnaire impérial envoyé par Honorius, ou plus exactement par son magister militum tout puissant Stilicon :

  • La légion palatine des Herculiens (Herculiani Seniores)
  • La légion palatine des Joviens (Ioviani Seniores)
  • Une légion qui porte le nom d’Honorien  (identification malaisée, mais une légion gauloise portant le nom de l’empereur, cela peut être les Lanciarii Gallicani Honoriani )
  • L’auxiliat palatin des Lions (Leones seniores)
  • l’auxiliat palatin des Nerviens (Sagittarii Nervii Gallicani)
  • l’auxiliat palatin des Invincibles (Invicti iuniores Britanniciani )
  • l’auxiliat palatin des Heureux( Felices seniores ou Felices iuniores )

Via un autre auteur, nous connaissons le nombre de soldats envoyés en Afrique depuis la Gaule (le corps expéditionnaire en provenait) : 5000 hommes.

Aussi, si l’on considère que les légions comptent environ 1000 hommes chacune et les auxiliats 500, on arrive précisent au chiffre de 5000 !

Quelques remarques à propos de cette force :

  1. la faiblesse des moyens militaires romains de l’époque est évidente : rétablir l’ordre dans une province aussi stratégique que l’Afrique avec des effectifs aussi faible en est l’aveu.
  2. Depuis le début du IVème siècle, les opérations d’envergure sont systématiquement confiées aux mêmes unités d’élite (dans une configuration que l’on retrouve paradoxalement aujourd’hui dans les armées modernes professionnalisées !) : on ne compte plus l’emploi des deux meilleures légions de l’empire, les Herculiani et l’unité-soeur  des Ioviani ! D’ailleurs, opposées à une force considérable de 70 000 hommes (il est vrai composée en partie de guerriers maures qui n’ont jamais été redoutables en bataille rangée) dont des unités romaines locales mutinées, elles n’en firent qu’une bouchée.
  3. L’utilisation de légions exclusivement gauloises anticipe le choix suicidaire (et plus politique que stratégique) de Stilicon de concentrer toutes les forces de l’empire sous sa coupe au détriment de leur frontière de compétence. Pour mon projet, que je fixe à 399, c’est bien le début de l’histoire !

15 commentaires Ajouter un commentaire

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